La CAP de première affectation des inspecteurs stagiaires de la promo 2019/2020 s'est déroulée les 22 et 23 octobre 2019.


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Déclaration liminaire

Monsieur le Président,

Le contexte économique et social du pays est la résultante de la politique conduite par le gouvernement : une économie qui profite aux riches, un délabrement social pour les classes moyennes et les citoyens les plus fragiles. Comment pourrait-il en être autrement à la vue des dernières mesures concernant entre autres l’indemnisation du chômage, le projet portant sur la réforme des retraites et l’abandon des services publics sur une grande partie du territoire ?
Emmanuel Macron, lors de sa campagne électorale, a revendiqué sa théorie du "en même temps" en insistant sur la nécessité de marcher sur les deux jambes. Qu’en-est-il de cette marche lorsque une jambe a été sectionnée  et que l’autre n’a cessé de croître ? C’est exactement ce que vit une grande majorité de nos concitoyens avec cette politique injuste mais tellement facile, sous couvert de vertu budgétaire : prenons le peu qu’il y a à prendre au plus grand nombre et favorisons une petite caste les "premiers de cordée".
Sans caricaturer outre mesure les propos du pouvoir politique il faut entendre : les chômeurs sont des fainéants, ils n’ont qu’à traverser la rue pour trouver du travail, les retraités coûtent trop cher diminuons leur pensions, les habitants des zones péri-urbaines ou rurales qui se plaignent de la désertification et de l’absence de service public n’ont qu’à déménager, les fonctionnaires sont des nantis protégés, quelle horreur, par un statut, il faut donc les précariser. Quelle belle société !
Un pays qui compte près de 67 millions d’habitants ne se gère pas comme une start-up et si l’on croit cela, il est temps de changer de fonction.
Pour revenir sur l'abandon des services publics, la DGFiP a toujours été à la pointe. Si depuis 2002 de multiples réformes et fermetures de services ont affaibli notre administration, l'objectif que se donne le gouvernement pour 2022 est d'un autre niveau : c'est sa destruction pure et simple.
Le nouveau réseau de proximité : de proximité de qui, de quoi ? Il n'a de proximité que le nom !
Il n'est en aucun cas au service du public et ne pourra répondre à ses attentes.
Baptisé « géographie revisitée », ce projet a été conçu pour permettre la suppression de plusieurs milliers d’emplois et s’inscrit dans la vision d’un service public dématérialisé au-delà du raisonnable et se traduit concrètement de la manière suivante : les trésoreries de proximité sous leur forme actuelle n’existeraient plus. Leurs missions seraient scindées entre des services de gestion comptable (SGC), environ trois fois moins nombreux que les trésoreries actuelles, et des conseillers aux décideurs locaux (CDL).
De nombreux services des impôts des particuliers (SIP), de services des impôts des entreprises (SIE), de services de la publicité foncière (SPF) et d’autres services plus spécialisés (les services locaux de contrôle fiscal par exemple) verraient leur nombre se réduire par voie de suppressions et de regroupements.
Pour convaincre les élus locaux du bien fondé de sa démarche, le gouvernement axe la promotion de son projet sur les « points de contacts » qu’il entend mettre en place au travers des « maisons France service » (MFS) et de formes d’accueil itinérants.
Cette communication est trompeuse : elle mélange l’évolution du réseau propre de la DGFiP et celle de structures légères, généralistes, et à la pérennité très incertaine.
Pour autant, les élus ont conscience d'une publicité mensongère, les associations des maires de France ont interpellé le gouvernement et fait part de leur opposition au projet Darmanin.

Loin d'être des services de la DGFiP au professionnalisme et à l'expertise reconnus, ces « points de contact » seraient juste constitués de deux personnes au statut non précisé (contractuels, fonctionnaires territoriaux…) censées assurer un accueil de premier niveau pour un nombre d’administrations et d’opérateurs nombreux et très divers (CAF, CNAV, CNAM, Pôle emploi, la Poste, certains accès de services des ministères du Travail, de l’Intérieur ou de la Justice, etc.).
Pour la DGFiP, les MFS se cantonneraient au dépôt de déclarations et de réclamations, à la prise de RDV et à l’accès à un poste informatique. Les personnes présentes à demeure ne seront pas des agents de la DGFiP. Cette « géographie revisitée » se traduira par un repli territorial inédit et brutal de la DGFiP.
Ce projet comporte plusieurs dangers. De fait, cette réorganisation se traduira par une désertification accrue des services de l’État en zone rurale et par un accompagnement quotidien des élus locaux incertain. Il va accroître le sentiment d’abandon et décevoir la population qui réalisera, par exemple, que les MFS ne peuvent remplacer un service public technicien.
Ce projet s’accompagne d’autres évolutions tout aussi néfastes. Il en va ainsi de l’interdiction, pour le service public, d’encaisser du numéraire alors qu’on offre cette possibilité aux débitants de tabac. Si l’accent a été mis dernièrement sur la fraude sociale, l’évolution du contrôle fiscal est à front renversé et la fraude atteint des niveaux records ! Si la communication gouvernementale se voulait volontariste, en réalité, le caractère dissuasif du contrôle est sévèrement remis en cause par le choix d’une politique d’élargissement des procédures de régularisation et de simple accompagnement des entreprises à l’issue des contrôles. Et que dire de la communication présidentielle qui de manière inadmissible, dénigre injustement le travail des agents de contrôle.

Les agents ne sont pas dupes des attaques portées contre le service public et contre eux, le niveau de mobilisation ne faiblit pas. Depuis le printemps dernier, de très nombreuses actions locales ont été organisées. La journée du 16 septembre a été une réussite, en particulier dans les directions territoriales. Depuis, la mobilisation se poursuit sous forme de grèves, de « votation » et d’autres types d’actions. Solidaires Finances Publiques appelle les personnels à amplifier le mouvement jusqu’au retrait du plan Darmanin, et à participer massivement à la journée de grève et de manifestation du 14 novembre prochain à l'appel de l'intersyndicale DGFiP.

Ces réformes d'ampleur accélèrent la dégradation des conditions de travail des personnels, avec de lourdes conséquences sur leur santé, ce qui a déjà conduit certains agents à des gestes désespérés.
Solidaires Finances Publiques dénonce l'indifférence assumée du DG devant ces drames humains récemment survenus à la DGFIP. Notamment son attitude lors du CTR du 3 octobre est la marque d'un mépris profond vis à vis des agents de la DGFiP.

Concernant cette CAP :
Une nouvelle fois, nous constatons que l’administration refuse de publier sur Ulysse le mouvement de première affectation ce qui empêche les agents de savoir s’ils ont été lésés ou non. Solidaires Finances Publiques revendique la transparence pour tous les actes de gestion, et le maintien des CAP qui permettent de s'assurer du respect des règles de gestion.

Les modifications des règles de première affectation sont liées à la formation initiale revisitée des inspecteurs et inspectrices. Solidaires Finances Publiques a toujours revendiqué une formation initiale orientée sur la carrière et non sur le premier métier. C’est pourquoi Solidaires Finances Publiques a dénoncé la nouvelle scolarité dès sa présentation, non seulement installée dans la précipitation, mais qui ne répond en rien aux besoins réels des services et des stagiaires.
Solidaires Finances Publiques a depuis son origine dénoncé les dérives que la réforme génère, notamment en matière d’affectation. Force est de constater que les faits lui donnent tristement raison.

En premier lieu, il est extrêmement compliqué d’anticiper au plus près les besoins des services, un an à l’avance, c’est-à-dire quand l'installation de premières affectations intervient au même moment que celle des titulaires du mouvement général… suivant. La réalité est que certains stagiaires ont du coup été affectés en local sur des affectations parfois très éloignées de leur bloc fonctionnel de formation. Par exemple ces stagiaires formés au PRS et affectés adjoint de SIP ou trésorerie impôts, un autre formé au SIE et qui doit rejoindre un PRS, ou pire encore, un bloc foncier affecté en SIP. On est très loin pour ces inspecteurs de la formation premier métier vantée par la DG. Et c’est sans compter les stagiaires qui ont postulé pour la DG ou les DNS et qui ne sont pas arrivés dans les directions locales prévues au départ. Le choix fait par la DG d’affecter les inspecteurs et inspectrices en première affectation sur ces types de postes au même moment que le mouvement général, est bien la preuve qu’il est absolument impossible d’anticiper les besoins réels un an à l'avance !
Par ailleurs, dans le cadre de la géographie soit disant de proximité, des nombreuses réorganisations envisagées qui en découleraient et des règles de priorité instaurées, rien n’indique que les agents, et a fortiori les premières affectations, pourraient rester sur un même poste ou une même spécialité pendant 3 ans.

Toutes ces réorganisations imposées que Solidaires Finances Publiques combat, devraient plaider pour une formation généraliste ou serait privilégiée l’adaptabilité et non le premier métier.

Au contraire, la DG s’entête dans ses errements au détriment de l’intérêt des services et des agents. Pire, en réponse aux changements d’affectation en local, elle a décidé pour la présente promotion une affectation uniquement géographique sans donner de possibilité de choix fonctionnel. C’est une régression sans précédent pour les stagiaires, car un certain nombre d’entre eux privilégiait le choix fonctionnel au choix géographique. Cette décision ne peut que générer davantage de frustration encore chez les stagiaires que celle qui existe déjà. Et une frustration généralisée n’est jamais une bonne chose ni pour les services ni pour les agents.
D'autre part, Solidaires Finances Publiques condamne une nouvelle fois l'opacité la plus totale qui règne quant à la répartition des stagiaires dans les écoles. Un certain nombre d’entre eux sont des « malgré eux ». Ils vivent d'autant plus mal cette situation qu’elle impacte parfois leur possibilité d'une affectation proche de leurs intérêts familiaux et moraux. Solidaires Finances Publiques exige des règles claires et connues des stagiaires à l'avance.
Par ailleurs, dans l'instruction sur le dispositif de première affectation du 17 juillet 2019, vous indiquez que les directions éligibles à l'accueil d'inspecteurs ou d'inspectrices stagiaires sont les directions pour lesquelles ne subsistent, à l'issue du mouvement 2019 des titulaires, aucun agent prioritaire n'ayant pu obtenir satisfaction (titulaire prioritaire en attente). Pour Solidaires Finances Publiques, cette vision est erronée. Il existe bien des titulaires en attente de rapprochement, mais ils n'avaient pas un délai de séjour suffisant pour pouvoir postuler. Il s'agit des désormais titulaires des promotions 2017-2018 et 2018-2019 en situation de rapprochement de conjoint. Et ils sont d'autant plus en colère que dans au moins une direction, un poste de contractuel en CDD est proposé alors qu'au moins un collègue est en attente de rapprochement.
Solidaires Finances Publiques dénonce d’autant plus ce recrutement contractuel qu’il s'opère alors qu’au moins un titulaire, qui plus est en rapprochement de conjoint, sollicite cette direction.
Solidaires Finances Publiques dénonce aussi l'impossibilité de pouvoir opérer des cascades suite aux recrutements en Services centraux et DNS. Ainsi, comme l'année passée, certains stagiaires n'auront pas une meilleure affection alors que le poste convoité sera libéré, et il risque d'exister des surnombres sur des directions, notamment franciliennes, impactant considérablement le mouvement général suivant.
Par conséquent, de nombreux agents se sentent lésés par ces premières affectations et notamment :
- les stagiaires qui n’ont pas pu effectuer de demande d’affectation fonctionnelle,
- les stagiaires de cette promotion et de la précédente qui subissent une formation détériorée
- les stagiaires des deux promotions précédentes qui n’ont pas pu faire valoir leur rapprochement de conjoint du fait du délai de séjour,
- les très nombreux titulaires en convenance personnelle qui se sont vus refuser une affectation nationale au dernier mouvement et qui vont voir arriver une première affectation sur les postes convoités, amputant ainsi leur possibilité de l'obtenir pour les deux années suivantes
- les très nombreux titulaires qui du fait de l'allongement du délai de séjour de un à deux ans pour une mutation pour convenance personnelle ne peuvent pas postuler pour des postes qui les intéressent.
Dans ces conditions, la DG ne doit pas être surprise des résultats catastrophiques de l'observatoire interne. Car comment rester motivé quand autant d'agents sont lésés par les changements de règles successifs ? L'administration, par ses décisions prises unilatéralement, a généré frustrations et désillusions, mais surtout supprime progressivement aux agents l'espoir d'obtenir un jour l'affectation souhaitée, si importante pour la vie personnelle des agents.
Au final, ce sont bien les directions locales et le service public qui vont pâtir de ces décisions.
Pour Solidaires Finances Publiques, il est urgent de revenir à un délai de séjour unique d'un an, et à une formation de carrière avec des premières affectations intégrées au mouvement général et départagées selon la règle de l'ancienneté administrative.

Pour Solidaires Finances Publiques, la note au réseau présentant le dispositif de première affectation au sein des directions locales a le mérite d’exister. Nous espérons que la DG se donnera les moyens de la faire appliquer partout.
Une question demeure : la note invite les directions locales, sous réserve de ne pas se dispenser d'un examen individuel des situations, à départager les inspecteurs stagiaires selon le rang de réussite au concours tel qu'il résulte de l'interclassement réalisé par l'administration centrale. Nulle part est indiqué la possibilité pour les affectations en locales de faire valoir les rapprochements de conjoints ou situation prioritaire.
Solidaires Finances Publiques vous demande donc une réponse sur ce point.

En conclusion, si les élus de Solidaires Finances Publiques condamnent fermement les nouvelles règles d'affectation et la réforme de la scolarité, ils remercient néanmoins les collègues du bureau RH1C pour leur disponibilité et la qualité de leurs travaux.