La cour des comptes vient de sortir "Le télétravail dans la fonction publique après la crise sanitaire" en lien ici. Si nous pouvons rejoindre le rapport de la cour des comptes sur les constats, nous n’aboutissons pas aux mêmes conclusions.

Il est vrai que le télétravail avant la crise pandémique était marginal, à la DGFiP, il y a avait moins de 5 % de télétravailleurs et télétravailleuses. En période de confinement, les impératifs de limiter la propagation du coronavirus, ont fait exploser l’usage du télétravail. Comme dit dans le rapport, « cette progression s’est imposée au dernier trimestre 2021 aux décideurs publics dans des délais très brefs sans avoir été sous-tendue par une réflexion d’ensemble et prospective sur la gestion des services publics ». Oui, le déploiement du télétravail a nécessité un fort investissement de la part des employeurs publics en terme de matériel. Oui, le télétravail est une révolution dans les pratiques « managériales ».

Mais comme il est de coutume, la cour des comptes ne peut s’empêcher à travers ses rapports de fixer des lignes de politiques publiques, qui selon nous, contreviennent à l’intérêt général. « Par ailleurs, la pratique accrue du télétravail pose la question de l’utilisation de l’immobilier et de son coût. Alors que, dans le secteur privé, le lien a été fréquemment établi entre mise en œuvre du télétravail à grande échelle et réduction des surfaces de bureaux, la réflexion est loin d’être achevée au sein de la sphère publique ». Quelle n’est pas leur déception que le flex office, le flex desk ne soient pas déployées de manière massive dans les administrations. Mais heureusement elle a des préconisations : « La Cour considère que les employeurs publics devraient à partir d’un certain seuil (par exemple pour les agents durablement en télétravail pour plus de 50 % de leur temps de travail hebdomadaire ou lorsque la quotité de télétravail retenue pour le service est de trois jours) enclencher une dynamique similaire ».

Et la cour des comptes poursuit toujours fidèle à son leitmotiv du new public management de s’inquiéter que les télétravailleurs et télétravailleuses sont bien aussi productives que lorsqu’ils et elles sont en présentiel et de rappeler à l’employeur public qu’il lui faut se pencher sur la question du contrôle de l’activité et du temps de travail de ces derniers et dernières. La méfiance et la défiance une nouvelles fois.

La cour des comptes achèvent son propos pour inviter les employeurs à ne pas se satisfaire que le télétravail maintiennent un service public mais d’aller plus loin dans son déploiement puisque le télétravail a permis de changer la façon dont les usagers pouvaient prendre contact avec le service public. Pour simplifier et éclaircir leur propos, cela veut dire grâce à ces périodes de confinement les usagers et usagères ont été contraints à saisir l’administration par d’autres modes que l’accueil physique. Pour la cour des comptes, il faut aller plus loin dans la dématérialisation des services publics maintenant que les usagers et usagères ont été désintoxiqués de l’accueil physique avec deux propositions : un levier pour élargir les plages de contact des usagers avec l’administration, et pour développer une offre de contact par visioconférence.

Grâce au télétravail défaisons tous les acquis et les droits des fonctionnaires, travaillons 7 jours sur 7, 24h sur 24 sans tenir compte des effets sur la santé de telles mesures ni compensation financière d’aucune sorte. C’est l’opportunité pour l’employeur public de remettre en cause le temps de travail et surtout de ne plus avoir à proposer de lieux physiques d’accueil.

Bref rien de très original dans ce rapport si ce n’est le déploiement de la même logique néolibérale du travail, exploitation des salariés au service de l’usager qui devient client roi pour assouvir ses moindres désirs de consommation de service, loin de l’intérêt général et d’un service public au service des populations.

Solidaires Finances Publiques rappelle que nous ne sommes ni pour ni contre le télétravail. Il s'agit d'une modalité de travail qui répond à de réelles attentes de la part des agentes et agents des finances publiques. Mais pour le mettre en place, l'employeur public doit donner les moyens à ses agents et agentes de travailler dans de bonnes conditions leur permettant de préserver leur santé donc leur fournir un poste de travail qui ne se résume pas à un ordinateur portable mais à un poste identifque à celui au travail. Les enjeux du télétravail sont bien organisationnels et il doit être intégré dans l'intérêt des personnels et des services dans le sens du service public rendu à l'usager. Le télétravail doit respecter des règles de mise en oeuvre et donc des principes de réversibilité et de volontariat. Tout projet orienté sur des réductions budgétaires n'amènent qu'à la dégradation des condtions de travail et de la qualité du service public.