Un Gt sur la prise en charge des aides aux entreprises et aux usagers à la DGFiP s'est tenu le 20 novembre 2025.
Déclaration Liminaire
Le GT du jour a la particularité d’être conjointement rétrospectif, avec une vision idéalisée des expériences passées et prospectives, mais sans réelle information sur ce pourrait être effectivement cette nouvelle mission. Dans ces conditions vous reste la seule alternative d’idéaliser des dispositifs, déjà mis en œuvre, dans le but assumé de nous assurer que tout se passera pour le mieux dans le meilleur des mondes.
Nous reconnaissons avoir quelques doutes quant à la réussite de cette prophétie autoréalisatrice, sans doute un peu échaudés par l’arrivée et la mise en place un tantinet chaotique de nouvelles missions, sans moyens suffisants, et avec l’idée que l’automatisation en sera le remède miracle. Nous constatons aujourd’hui un pas supplémentaire dans une logique d’état guichet et toujours plus au service des entreprises. La volonté politique de mettre la DGFiP au service des entreprises, en limitant son intrusion en leur sein, se poursuit. Au-delà de la continuation des principes de la loi ESSOC, l’axe général des documents nous fait craindre une minoration des critères et des conditions d’éligibilité des aides à venir.
Cet état de faits s’explique aisément, nous simplifions les conditions et l’exercice des contrôles a priori et a posteriori, car nous n’avons ni les moyens ni les effectifs pour les mener. Les suppressions de personnels se poursuivent et les transferts de mission ou l’apparition de nouvelles tâches alourdiront la charge de travail des personnels de la DGFiP et pèseront lourdement sur leurs conditions de travail. Solidaires Finances Publiques tient par ailleurs à rappeler une évidence, toutes aides supplémentaires créées entraînent une industrialisation des mécanismes de fraude.
Les exemples du fonds de solidarité et de la prime renov’ l’ont parfaitement démontré et doivent nous faire réfléchir dèsla mise en place d’un nouveau dispositif. Le Fonds de Solidarité a impulsé cette dynamique et la charge de travail induite avait ếté loin d’être simplement modérée, même si a posteriori la cour des comptes a vanté un dispositif simple et déployé rapidement. Elle avait oublié de préciser que la mobilisation des personnels avait été une fois de plus au rendez-vous et ignoré les difficultés rencontrées avec un dispositif mal ficelé La DGFiP, avec les suppressions de postes successifs depuis la fusion, est aujourd’hui exsangue. Imaginer que les services seront en capacité de contrôler a posteriori ces aides est illusoire.
Aussi il nous semble difficile dans ces conditions de nous enorgueillir de voir arriver de nouvelles missions, au demeurant peu valorisantes pour les personnels de la DGFiP, et qui feront de notre administration un simple « prestataire de services » sommé de répondre aux lubies pléthoriques, parfois justifiées par une urgence climatique, des gouvernements.
L’automatisation des traitements nous laisse circonspect quant à sa faisabilité. Quelle volumétrie ? Quelle typologie d’erreurs ? Après les transferts de missions douanières sans transfert d’emplois, la DGFiP récupère une nouvelle mission avec le versement des aides diverses et variées. Sans se soucier de ses missions originelles et des difficultés pour les mener à bien, elle répond à la commande politique d’un plan de simplification des procédures et de versement rapide des aides.
Dans ce contexte, la place du contrôle est forcément limitée. Cette simplification pour les usagers se limite à un point d’entrée unique qui entraînera de lourdes difficultés pour les personnels de la DGFiP. Quel routage des e-contacts, quelles formations pour les personnels des centres de contact qui seront en lien direct avec les usagers. La DGFiP n’étant pas avare en oxymores, la simplification vantée sera assurément une source de complexité supplémentaire pour les personnels de notre administration.
La DGFiP n’en sort pas grandie !
Compte-rendu
Dès l’ouverture de cette réunion et en propos introductifs, le président de séance qualifie ce GT de prospectif. Il souhaite en effet évoquer avec les représentants des personnels les perspectives d’organisation d’une nouvelle mission.
De manière ponctuelle et dans des domaines variés (fonds de solidarité, aides énergie, GNR BTP...), la DGFiP est intervenue dans le versement d’aides aux entreprises décidées par l’État. Et la DG se plaît également à rappeler sa réactivité, d’ailleurs soulignée par un rapport de la Cour des Comptes, lors de la mise en place du fonds de solidarité.
C’est avec moult précautions que la DG présente ses pistes de travail et réflexions sur les modes d’organisation de la gestion des aides de l’État, sur la sécurisation de leur traitement, sur le traitement des recours contre les décisions et sur la lutte contre la fraude aux aides.
En réponse à nos propos liminaires, la DG admet que la mise en place du fonds de solidarité a connu quelques vicissitudes tout en rappelant qu’elle s’est effectuée dans un contexte particulier de crise sanitaire et de plan de continuité d’activité. Il s’agit désormais d’aller vers une mission pérenne à la fois dans le versement d’aides aux entreprises, mais aussi envers les particuliers, et de mobiliser la DGFiP sur une mission à valeur ajoutée (avec une dimension expertise et contrôle). Il n’est pas prévu d’organiser un chantier de grande ampleur si la mission confiée n’est pas pérenne. Sur les inquiétudes de voir arriver de nouvelles missions (et donc une charge de travail supplémentaire), la DG assure « qu’il n’y aura pas de transfert de missions pérennes sans moyens » et que « la DGFiP n’a pas vocation à aller sur toutes les aides». Pour Solidaires Finances Publiques, les promesses n’engagent que ceux qui y croient et les expériences passées (taxes douanières, d’urbanisme…) démontrent le contraire. Par ailleurs, notre syndicat a également souligné les difficultés actuelles du contrôle de certaines aides ou crédits d’impôt (cf : CIR).
S’agissant du pilotage des dispositifs d’aide de l’État par la DGFiP
Depuis sa création en 2023, la cellule Aides de l’État a été chargée d’une dizaine de régimes différents. Son rôle est d’organiser le dispositif depuis sa création jusqu’à l’épuisement des voies de recours. Son rôle est de rédiger les textes instituant les aides de l’État, de s’assurer de leur mise en œuvre et de vérifier sa mise en œuvre opérationnelle (notamment sur les conditions d’éligibilité, les modalités de calcul et le contrôle) et de prévoir les modalités de mise en œuvre (guichet E-contacts ou guichet démarches simplifiées). Elle élabore également le cadre juridique de gestion qui permettra à la DGFiP de mettre en œuvre le dispositif d’aide. Sont ensuite choisie(s) la ou les directions locales gestionnaires de l’aide. La Cellule d’aides de l’État assure la formation des interlocuteurs locaux et apporte un soutien aux cellules instructrices.
S’agissant des modes d’organisation de la gestion des aides de l’État, la DG rappelle que la DGFiP agit en qualité de prestataire de service pour le compte de directions ministérielles ou d’opérateurs publics. Le versement d’une aide pour le compte d’autrui nécessite une délégation de gestion pour réaliser les opérations d’instruction et d’attribution de l’aide ainsi que son ordonnancement et sa liquidation. Jusqu’à présent, 3 schémas d’organisation ont été utilisés et présentent avantages et inconvénients:
- organisation mixte avec une instruction en local avec l’ordonnancement et le paiement réalisés en centrale. Cette organisation, retenue pour assurer le versement du fonds de solidarité (et les aides « coûts fixes »), permet de traiter rapidement un nombre massif de demandes et de verser les aides dans des délais réduits. Des cellules instructrices locales contrôlent les conditions d’éligibilité pour validation et mise en paiement et SPIB-2A émet les ordres de payer. Ce mode d’organisation très dérogatoire a été utilisé pour faire face à des urgences (crise Covid notamment).
- organisation centralisée avec la liste des bénéficiaires et le montant éligible réalisés en centrale. Utilisée en janvier 2025, cette organisation est rare et suppose que la DGFiP dispose de l’intégralité des éléments.
- organisation intégralement déconcentrée dans le respect de toute la chaîne de traitement de l’aide (service instructeur, service BIL et comptable). Cette organisation a vocation à être désormais privilégiée et à rendre les directions locales parties prenantes à la nouvelle mission.
S’agissant de la sécurisation du traitement des aides de l’État, selon l’organisation retenue, la DG prévoit la mise en place de mécanismes permettant de fiabiliser chaque étape de la chaîne de traitement des demandes.
Au moment de l’instruction des demandes, une première série de contrôles automatiques est effectuée avec possibilité d’un rejet direct sur des critères déterminés (absence de résidence fiscale française, défaillance déclarative…). Ces contrôles peuvent être complétés, selon les conditions d’éligibilité, par des vérifications également automatisées (existence d’une procédure de sauvegarde, dépassement d’un seuil de salariés…).
La réalisation de ces contrôles s’appuie sur des données connues de la DGFiP ou communiquées par la sphère sociale.
Une fois ces contrôles réalisés, la demande d’aide fait l’objet soit d’un paiement soit d’une instruction par les services de la DGFiP.
Lorsque l’organisation mixte ou centralisée a été retenue pour le versement d’une aide, SPiB-2A, ordonnateur délégué, effectue des contrôles a posteriori.
Quant aux contrôles du comptable, ils varient également en fonction du circuit de gestion de la dépense retenu.
A noter que depuis la mise en place du fonds de solidarité en 2020, tous les textes instituant les dispositifs d’aide comprennent un article permettant de récupérer les indus de versement.
S’agissant du traitement des recours contre les décisions relatives aux aides de l’État
En général avant de saisir la juridiction administrative, les entreprises déposent une réclamation dans E-contacts pour contester le motif de rejet ou le montant de l’aide obtenu. Les cellules instructrices sont chargées de traiter ces recours et de procéder au réexamen de la demande d’aide. Un traitement rapide et efficace des réclamations adressées à l’administration permet de limiter les recours contentieux.
En conclusion du GT, la DG rappelle que le Gouvernement a présenté un plan de simplification en avril 2024 afin de clarifier le paysage des organismes de versements des aides publiques. Compte tenu des constats très positifs sur l’action de la DGFiP, diverses pistes de réflexion sont ouvertes sur le rôle qu’elle pourrait jouer dans l’avenir. La DGFiP pourrait soit « être gestionnaire des aides de l’État » ou « verseur des aides de l’État ». Une mission portant sur la rationalisation de la gestion des aides de l’état et des organismes de versement des aides publiques a été confiée par le Premier Ministre à l’IGF, à l’IGAS, à l’inspection générale de l’environnement et du développement durable. Leurs travaux sont en cours. Les premiers arbitrages sont attendus pour cette fin d’année.
Pour Solidaires Finances Publiques, l’arrivée d’une mission pérenne à la DGFiP peut certes être une bonne nouvelle, mais ne doit pas se réaliser à n’importe quelles conditions, et encore moins réduire l’action de notre administration à un simple rôle de prestataire de services. Elle suppose également des garanties (effectifs, formations, moyens) et une plus-value professionnelle valorisante et reconnue pour les agents. Au-delà de la présentation des schémas possibles et autres circuits de versements, Solidaires Finances Publiques a souligné l’impact de l’arrivée d’une nouvelle mission dans les services et son articulation entre les différents services concernés tout en pointant la nécessité d’avoir pour les agents une formation adaptée.