Le CTR sur la PAS s'est tenu le 10 mars

 

liminaire

Monsieur le Président,

Cette séance du comité technique de réseau se tient en seconde convocation après un épisode pour le moins éclairant sur votre attachement viscéral au dialogue social, sur votre respect indéfectible de la démocratie sociale et des organisations syndicales qui tentent de faire vivre l'un et l'autre, dans un contexte où vous avez décidé de réduire le premier à l'expression de vos propres orientations sans qu'aucun véritable débat contradictoire ne soit possible, de bafouer, voire d'insulter les seconds.


La date de la première convocation, non prévue au calendrier prévisionnel, a été maintenue malgré l'absence connue de l'une des organisations syndicales représentative dans ce comité. La date de re convocation avait été initialement prévue le 13 mars, date à laquelle une autre organisation syndicale représentative dans cette instance avait de longue date annoncé son indisponibilité. Elle a été finalement déplacée à aujourd'hui 23 mars 2017, sans aucune concertation ni la moindre information, alors même que Solidaires Finances Publiques vous avait informé, dès la parution du planning du premier semestre, de l'impossibilité de son Secrétaire général de conduire la délégation.
Autant de signes qui caractérisent votre attitude envers nous et les objectifs que vous poursuivez.
Nous ne reviendrons pas sur la manière dont vous avez réduit les droits des élus du personnel dans les CAP nationales et locales ainsi que dans les CT locaux, si ce n'est pour affirmer, qu'au point où nous en sommes nous ne lâcherons rien ! Bien évidemment, nous restons persuadés, comme nous l'avons par ailleurs affirmé auprès de vos proches collaborateurs, que le dialogue social, la concertation, la négociation sont indispensables, mais pour cela, il est indispensable que l'administration ne fausse pas les règles du jeux et qu'elle respecte les parties en présence et la représentativité issue des suffrages professionnels et malgré notre volonté affirmée auprès de vos collaborateurs les plus proches de revenir, pour employer la formule consacrée, à la « table des négociations »,
Ce CTR est essentiellement consacré aux modalités d'application du prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu.

Vous n'êtes pas sans méconnaître la position de notre organisation, résolument défavorable à ce mode de recouvrement de l'impôt sur le revenu.

Cette position trouve ses racines dans les valeurs fondamentales portées par notre organisation, qui visent à la promotion d'un service public au plus près des citoyens et qui soit le vecteur d'une action publique forte, socle indispensable à la cohésion nationale et à la démocratie. Notre position s'appuie également sur la conviction profonde d'une nécessaire réforme de la fiscalité qui permette notamment de renforcer le consentement à l'impôt, de clarifier les termes du débat fiscal en matière de justice fiscale et de redéfinir les objectifs de la politique fiscale.
Cet appel syndical à un changement de paradigme en matière de fiscalité, ne trouve nullement sa réponse dans la mise en œuvre du PAS. Bien au contraire, au détour d'une réforme présentée comme exclusivement axée sur le recouvrement de l'IR, se sont glissées des dispositions techniques qui, à terme, pourraient conduire à modifier en profondeur notre système fiscal mais également à fragiliser le positionnement de la DGFIP.
Ainsi, la faculté accordée aux collecteurs qui emploient moins de 11 salariés, de reverser trimestriellement les montants dus de prélèvement à la source auprès des organismes de recouvrement des cotisations sociales nous interpelle au plus haut point. Lors des GT que vous avez présidé, rien ne laissait supposer que les implications se situeraient à ce niveau. En effet, cette mesure présentée comme une simplification pourrait concerner 1 230 000 établissements employant 3 060 000 salariés.
Dès lors nous avons besoin d'explications mais surtout de garanties. En effet, les textes soumis à l'examen de ce CTR ne permettent pas d'affirmer que la DGFIP conservera l'entière maîtrise du recouvrement de l'IR. Et pourtant, c'est bien sûr avec cette tonalité que avez tenté de vendre la réforme aux agents !
Il en est de même sur le partage des responsabilités entre la DGFIP et l'URSSAF notamment. Quel sera le rôle effectif des organismes sociaux qui seront en situation intermédiaire entre les employeurs et la DGFIP ? Il est pour le moins inquiétant, pour ne pas dire inacceptable, qu'à ce stade de la mise en œuvre de la réforme, nous en soyons à ce niveau de dissimulation du rôle respectif des uns et des autres. Qu'est-ce que cela masque ? Pour Solidaires Finances Publiques, la DGFIP doit conserver la maîtrise intégrale de la chaîne de traitement et de recouvrement de l'IR et être la seule administration habilitée à effectuer des opérations de contrôle en lien avec le respect des obligations déclaratives et de paiement.
Par ailleurs, cette mesure de simplification instaure le concept d'une globalisation possible des paiements fiscaux/IR et sociaux. Concept pour nous inconcevable.

Tout ceci met en évidence que le gouvernement et la DGFIP se sont emparés d'un sujet, le PAS, bien plus vaste qu'il n'y paraît, sans en maîtriser véritablement toutes les incidences et conséquences au plan politique, social, structurel et organisationnel.

Depuis l'annonce de l'instauration du PAS, Solidaires Finances Publiques a dénoncé l'impact que cela aura sur les services, sur l'organisation du travail et sur les effectifs. Nos craintes étaient fondées, car lors du Groupe de travail du 23/2 vous avez confirmé votre intention de mobiliser dès la fin de l'été, l'intégralité des Centres de contact (CDC) et pour partie les Centre impôts service (CIS), renvoyant ainsi sur les services SIP et SIE certaines charges qu'ils n'ont désormais plus les moyens d'assurer. Ceci ne répond en rien aux attentes des agents des SIP et SIE qui mesurent avec inquiétude les retombées de ce dispositif sur leur quotidien. Les très nombreuses questions qui remontent via les premiers stages organisés sur le PAS, démontrent l'étendue du questionnement des agents vis-à-vis de cette « réforme ». Nous avons évoqué ce point lors du GT et vos services nous ont répondu, qu'une foire aux questions étaient en cours d'élaboration. Nous avions émis le souhait d'être destinataire de cette FAQ. Nous sommes dès lors, surpris de constater que de nombreuses réponses aux questions posées par les stagiaires font l'objet de précision dans un document de type FAQ, document qui ne nous a pas été remis. Il nous est difficile de parler de volonté de transparence, dans ce contexte.
Pour Solidaires Finances Publiques, la conjonction de la montée en puissance du PAS avec toutes les questions, les difficultés, les incidents que cela va générer chez les usagers (particuliers et employeurs) et de l'état de fragilité extrême dans lequel se situe le réseau DGFIP après des années de suppressions massives d'emplois, ne peut que nous alarmer sur la capacité réelle de notre administration à pouvoir faire face. Les difficultés des services ne seront pas amoindries avec les 500 emplois en moins fléchés PAS sur le volume des suppressions d'emploi de 2017.
Le risque d'accident industriel n'est donc plus à écarter et il peut prendre différentes formes. Bien entendu, le risque majeur est lié aux opérations de fiabilisation des états-civils. Sur ce sujet, la situation d'un tout jeune département français, Mayotte, pour lequel le taux de fiabilisation avoisine les 40 %, nous interroge d'autant plus. Le risque d'accident industriel est-il évalué ? Nous l'espérons et auquel cas : que préconisez-vous pour assurer la continuité du service public, partout, sur nos territoires et ce avec la même égalité de traitement ? Mais nos craintes se portent également sur la capacité de certaines applications informatiques à absorber, sans défaillir, la charge nouvelle que représente le PAS (Médoc notamment), sur la sécurisation des échanges de données numériques entre les différents opérateurs (tiers collecteur, GIP, Urssaf, DGFIP), sur les conséquences de la priorité donnée au PAS par rapport à d'autres missions qui pourraient ainsi être fragilisées, sur l'attitude de certains intermédiaires (GIP – Urssaf, ...) qui pourraient volontairement fragiliser la DGFIP à des fins stratégiques liées à leur propre développement. S'agissant des GIP, quels seront ses outils de liaison avec la DGFiP en cas de défaillance et quels seront les délais applicables ?
Un autre préoccupation est également bien présente dans le paysage et elle concerne l'appropriation de la déclaration sociale nominative (DSN) par les collecteurs de la retenue à la source. Celle-ci sera-t-elle à la hauteur des enjeux ? Car, comme vous le rappeliez lors du GT du 23/2, il s'agit là d'une réforme considérable. Dès lors, nous estimons qu'il est primordial que cet outil soit correctement servi, comme il est primordial qu'il soit correctement appréhendé tant par les employeurs que par les salariés. Ces derniers ne devant en aucun cas y voir, une intrusion dans leur vie privée. Pour ce faire, la DGFIP ne peut se reposer que sur des partenariats. C'est pourquoi, nous considérons que toutes les garanties ne sont pas réunies à ce jour et nous ne pouvons exprimer un avis favorable sur les textes qui nous sont soumis.

Monsieur le Directeur Général, vous n'avez de cesse de dire que le PAS est une réforme qui renforce la DGFIP, hors notre désengagement sur nombre de points, le fait que des strates supplémentaires sont intégrées dans la chaîne du recouvrement de l'IR nous conduit à douter de la pertinence de votre vision de l'avenir.

Face à une telle réforme, la confiance doit être au rendez-vous, car sans confiance il est difficile de faire partager une ambition, un projet. Force est de constater, que les zones d'ombres, les non-dits, les omissions qui entourent cette réforme et sa mise en œuvre pour les services, ainsi que la brutalité avec laquelle vous abordez les questions RH sans oublier le manque d'ambition en matière de formation, nous figent dans la réserve et parfois la défiance.

Cette défiance n'est saine pour personne et il appartient à vous seul, de créer les conditions propices et nécessaires à la cohésion de l'ensemble des acteurs de la DGFIP.

Cet exercice n'est pas gagné, car lors du GT du 23/02 vous n'avez, à aucun moment, abordé le sujet de la centralisation du recouvrement amiable qui concernera les acomptes d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux, effectués sur les comptes bancaires des usagers. Pourquoi avoir dissimulé à 15 jours de la date de 1ère convocation du CTR votre intention de vous attaquer à l'organisation comptable de l'encaissement de ces acomptes ? Pourquoi avoir masqué votre intention d'accélérer votre processus de simplification et d'optimisation des coûts en confiant à la DDFIP de Haute Vienne l'exercice de cette mission ? Pourquoi avoir tenu les personnels au plan local dans l'ignorance ? Votre attitude illustre, une fois de plus, un fonctionnement qui fracture et qui fait abstraction des questions humaines.

Alors que d'autres, à d'autres époques, concevaient la DGFIP comme un laboratoire social, votre gouvernance nous conduit à constater que vous lancez des pistes, qui toutes, sont de nature à fragmenter la DGFIP sur la base de conceptions radicalement libérales et anti-sociales. Cet épisode est révélateur de vos projets, car il porte les prémices d'une centralisation du recouvrement y compris du recouvrement forcé. Les services territoriaux dépouillés de leur mission, seront alors condamnés à l'extinction. Cette stratégie est pour Solidaires Finances Publiques inacceptable car contraire à notre vision de ce que doit être la DGFIP.

Pour Solidaires Finances Publiques, fragilisée par les suppressions d'emplois, par les réformes successives et les réorganisations sans fin, la DGFIP se devait de faire une pause pour reprendre pied et permettre notamment aux agents de retrouver leurs repères. En réponse, nous sommes confrontés à une réforme majeure qui va modifier en profondeur les repères de la DGFIP et l'organisation des chaînes de travail.

C'est pourquoi Solidaires Finances Publiques réaffirme ses réserves sur le prélèvement à la source et son opposition aux dispositions retenues pour sa mise en œuvre opérationnelle. Nous rejetons dès lors l'ensemble des textes soumis à l'examen de ce CTR.

Bien évidemment, nous avons bien conscience qu'une première marche a été atteinte et que la probabilité que le PAS soit effectif au 1/01/2018 est forte. Nous avons néanmoins bien entendu vos propos, comme quoi, la DGFIP serait en capacité de faire volte-face si le pouvoir législatif optait pour un autre dispositif. Dès lors, quel serait votre plan B en cas d'abandon du PAS par une nouvelle législature ? Toutefois, ce qui nous importe, c'est que nul n'ignore les difficultés que les agents vont devoir surmonter. C'est pourquoi, nous exigeons une transparence totale sur les mesures à venir, un soutien renforcé des services avec notamment des moyens supplémentaires pour faire face aux charges qu'ils vont devoir assurer. La question des moyens et du respect des structures de travail est donc centrale pour éviter de sombrer dans une spirale de l'échec qui serait catastrophique pour notre administration.
Nous ne pouvons conclure ce CTR sans insister sur la question cruciale de l'emploi, emplois pérennes bien évidemment, le recours à des jeunes volontaires du service civique ou à des apprentis pour faire face à cette réforme ou aux conséquences de cette réforme sur le fonctionnement de certains services serait alors un non-sens et une provocation.

Nous vous remettons pour annexe au PV de ce CTR, quelques écrits de Solidaires Finances Publiques relatifs au Prélèvement à la Source (année 2016/2017).